Aventure
du CASABIANCA
Après avoir louvoyé en
Mer du Nord et au large des côtes Norvégiennes le Casabianca est désarmé en
1941. Conséquences de l'armistice... Placé sous le contrôle d'une commission
germano-italienne, il accueille à son bord le commandant L'Herminier, dont la
personnalité va changer le cours des évènements. Cet homme n'a jamais admis
l'armistice et la collaboration qui salissent son pays. Le "Casa" survit
pourtant en potentiel limité, désarmé, dépouillé de ses équipements de
submersion, de transmission radio. Le sous-marin n'est plus que l'ersatz de ce
qui fut l'un des tous meilleurs submersibles de la fin des années 30. Mais le
pacha ne désarme pas. Grâce à d'habiles stratagèmes et avec la complicité de
son équipage dont il ne tarde guère à devenir le leader incontesté, il
parviendra à réarmer son bâtiment et à conserver à bord 85 M3 de combustible.
Le tout au nez et à la barbe de la commission
d'armistice. |
Le 27 novembre 1942,
les SS envahissent Toulon, Jean Couturier se trouve à bord. Il fait partie des
hommes qui iront demander à L'herminier la poursuite du combat aux côtés des
alliés, en Afrique du Nord.
Comme tous ses
camarades, Jean est à son poste: "En fait, nous ne tenions pas un mais
deux postes. Pour ma part, lorsque nous étions en surface je remplaissais les
fonctions de radio, alors qu'en immersion, je passais aux barres de
plongée."
Ce soir-là le
Casabianca quitte donc la rade avec à son bord un équipage incomplet. Les filets
anti-intrusion obstruant la sortie du port s'ouvrent , le Casa file à plein
régime vers son destin. |
De l'échappée du
Casabianca, Jean l'Herminier tient un journal de bord précis : "5h05,
alerte au Klaxon ; ennemi sur les quais ; mitraillage ; sans perdre de temps,
j'ordonne : Larguez partout ! . 5h10 dépasse la Vénus prise dans un élément de
la panne. 5h 25: devant un filet anti-sous marin ; le patron du remorqueur
refuse d'ouvrir (Nota : Effectivement, l'entrée du port de Toulon est
interdite par un filet actionné à partir d'un remorqueur) ; bombe ; le
remorqueur commence à ouvrir la porte. 5h30 : barrage incomplètement ouvert ;
franchi le barrage ; trois avions mouillent les mines par parachute à 100 mètres
par babord avant ; plongée ; 5h 40 : route au 100 ; explosion de mines, diverses
avaries intérieures". |
Le "Casa" ne sera
plus rattrapé, malgré le feu ennemi. Il ne prendra pas la route d'Alger
aussitôt, le commandant l'Herminier décidant de mouiller au large de Toulon,
dans le but de venir en aide aux autres bâtiments Français qui auraient
éventuellement pu s'échapper de la nasse et le cas échéant, engager le combat.
Personne ne rejoindra le sous-marin et le 28 novembre, le Casabianca fait route
plein sud. Il atteint Alger sain et sauf, mais n'ayant pu s'identifier, se
heurte aux patrouilleurs Anglais, qui menacent de l'envoyer par le fond.
L'équipage ne devra son salut qu'à un message en morse envoyé grâce au
projecteur situé à l'avant du submersible : "Casabianca. Sous marin
Français. Casabianca"... (Lorsque l'officier de liaison Britannique
demandera à l'Herminier pourquoi n'a t-il pas répondu aux mots de passe alliées,
celui-ci lui répondra "qu'il ne les connaissait tout simplement pas..." )
Finalement, les alliés réservent un accueil triomphal aux "Free Frenchies" . le
Casabianca sera rejoint par deux autres sous-marins, le Marsouin et le
Glorieux, tous deux également échappés de Toulon. |
"On a pu lire
qu'en rentrant dans le port, précise Jean, nous avions hissé le
pavillon Français. Une photo existe effectivement, mais elle a été prise après.
En réalité, nous n'avions pas de drapeau Français à bord, mais un "Jolly Roger",
ou si vous préférez le pavillon à tête de mort et deux tibias entroicroisés,
emblème de la piraterie". Pour Jean Couturier, ainsi commence donc une
aventure qui le conduira 18 mois plus tard sur le sable de Sword beach. Avant
cela, le sous-marin où il sert va participer à plusieurs missions d'importance.
Elles ont trait au renseignement sur les côtes de Provence et la Corse. Il
s'agit de maintenir le contact entre l'Afrique du Nord et la France occupée, de
déposer et recueillir des agents sur les côtes Françaises, de ravitailler la
resistance en équipements de radio, de transporter et remettre de l'armement à
destination des mouvements combattants. La première mission est confiée au
commandant L'Herminier le 10 décembre 1942. Dans la nuit du 13 au 14 du même
mois, 4 agents de renseignement sont débarqués dans la baie de Chioni (Corse)
ainsi qu'un poste emetteur Anglais, destiné à établir la liaison entre l'ile de
beauté et Alger. Le 4 février 1943, la seconde mission du Casa l'emmène vers les
côtes Françaises ; il émmerge à la Roche Escudier, en Provence ou il débarque
une équipe de renseignement composée du Cne Guillot, du Lt Guillaume, et M.
Brown, attaché au consulat Américain d'Alger. Le submersible fait ensuite route
vers la Corse où il débarque en baie d'Arone une autre équipe de renseignement.
Puis, le 7 février retour à ce même endroit pour y débarquer 60.000 cartouches
et 450 armes automatiques destinés à la resistance
Corse. |
Dans la nuit du 6 au 7
mars 1943, une forte tempête contraint le sous marin à rebrousser chemin alors
qu'il se dirigeait vers les côtes de Provence. Mais quelques jours plus tard,
L'Herminier et son équipage parviennent à débarquer deux agents apportant des
fonds à la resistance Corse. Les deux agents ayant débarqué en décembre 1942
sont récupérés en retour. Le 2 juillet 1943, le Casabianca conduit le
commandant Colonna d'Istria dit Césari, sur la plage de Saleccia. L'homme est
chef des organisation de combat insulaires. Dans la continuité, 13 tonnes
d'armes et de munitions seront acheminées, à destination des maquis
corses.
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Dans la nuit du 5 au 6
septembre 1943, un débarquement d'armes et de munitions avorte au large du golfe
de Porto en raison d'un fusillade sur le rivage. Les embarcations doivent
regagner le navire en catastrophe.Ce n'est que partie remise car entre le 31
juillet et le 2 août, le chargement sera finalement livré aux resistants à
partir de la plage de Saleccia (Corse). Cette fois-ci ce ne sont pas moins de 20
tonnes d'armes et de munitions que le Casa transporte.
La 6e mission du
navire consiste dans le rapatriement à Alger de M. Giovini, second de la
resistance Corse. L'opération se déroule sans encombre, malgré la présence
proche d'un poste Italien. Le commandant L'Herminier profite de la mission pour
débarquer sur l'ile deux agents des services de renseignement, un poste de radio
et plusieurs tonnes de munitions.
La dernière mission du sous marin le
conduit une nouvelle fois en Corse, où seront acheminés 109 hommes du bataillon
de choc "Gambiez". Les 170 hommes ayant pris place dans le Casabianca
constituent un record pour un sous-marin de ce tonnage. Surnommé par les
Allemands "le sous-marin fantôme", le bâtiment de la France Libre en a terminé
avec les missions "particulières". Pour autant, sa carrière ne s'arrêtera pas là
: il deviendra patrouilleur et briseur de blocus alors qu'entre temps le
lieutenant de Vaisseau Bellet succède au commandant
L'Herminier. Touché par erreur par
un avion britannique en mai 1944, le Casabianca est envoyé en réparation à
Philadelphie (Etats-Unis) pour en ressortir en mars 1945. Il sera finalement
rayé des contrôles de la flotte en 1952, après un parcours
extraordinaire.
sur http://perso.wanadoo.fr/stephane.delogu/casabianca.html
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